SNCF Paris Beauvais : un conflit « dur » qui dure !

Publié le par L'Oise au Rouge 60

Depuis le 6 juillet, des agents de conduite ( ADC ) SNCF (majoritairement CGT) mènent une lutte contre la mise en place de l’EAS (Equipement Agent Seul) sur la ligne Paris - Beauvais , c’est-à-dire un seul agent le « mécanicien» à bord du train sauf présence d’une brigade de contrôleurs.

Comme le dit l’association LUTECE dans un numéro de son journal : « Les conducteurs, en grande majorité fermement opposés à cette méthode d’exploitation qui ne peut que dégrader la qualité de service et augmenter les risques d’incidents sûreté et sécurité sur la ligne, ont demandé fin juillet une réunion d’urgence avec le Conseil Régional et la direction régionale SNCF. »

Rappelons que cette ligne est considérée par le personnel SNCF de la région Paris Nord comme relativement « difficile » depuis une vingtaine d ‘années* (nombreuses agressions de voyageurs et de personnel) ; la plus grave en 2009 avec un agent ACT (contrôleur) dans le comas suite à des coups portés en gare de Méru !

En fait le combat s’est axé autour du droit de retrait, les ADC refusant de partir seuls et exercent ledit droit de retrait (suite bien sûr au droit d’alerte du CHSCT correspondant)

A contrario si le train est accompagné par un ACT ils assurent leur service normalement.

Extrait de l’ordonnance de référé Tribunal de Prudhommes de Creil 21 octobre 2014 :

"S'appuyant sur leur expérience de cette ligne et de leur métier, sur le droit d'alerte déposé par les représentants du personnel au CHSCT, sur le rapport accablant d'un cabinet d'experts indépendants mandatés par le CHSCT et sur l'avis de l'Inspection du travail, le demandeur a exercé son droit de retrait, considérant que la situation de travail dans laquelle la SNCF lui demandait d'exercer leurs fonctions, présentait un danger grave et imminent pour leur santé et leur sécurité."

(Nota : le demandeur est ici bien sûr les agents de conduite)

La direction SNCF rejetant ce droit a donc, outre les non-paiements des jours de présence des agents, fait venir des cadres traction et des ADC d’autres établissement ou régions afin de casser le mouvement ; leur octroyant au passage de jolies primes avoisinant les 1600 euros par semaine ! Outre les frais de déplacement !

Bien évidemment la présence de ces personnels détachés ( en clair des «jaunes » ! ) a entraîne quelques tensions et lors de confrontations sur les quais il est certain que quelques noms d’oiseaux ont fusé !

La direction régionale a donc décidé de sanctionner un certain de ces mécaniciens (6) et proposé pour deux d’entre eux la « radiation des cadres » une des plus importantes sanctions prévues dans la réglementation SNCF !

Le 8 septembre, un premier rassemblement avec des associations d’usagers s’est tenu à Amiens siège de la direction régionale SNCF, mais surtout siège du Conseil Régional qui est l’organisateur du trafic TER (organisateur et financeur aussi ! ) : fin de non recevoir de Claude GEWERC ! ( ex-usager SNCF il y a longtemps certainement ! )

Le 26 septembre, devant les menaces, c’est une montée régionale à Paris au siège de la direction traction avec préavis sur Paris Nord ou des centaines de cheminots actifs et retraités sont venus soutenir leurs camarades !

Depuis malheureusement certains agents de conduite de Beauvais ont repris le travail ! 3 mois de conflit c’est long surtout avec des pressions de la boîte !

Et le 21 octobre donc s’est tenu un Conseil des Prudhommes (sous présidence d’un membre du patronat), et ce jour-là le représentant des agents (environ 25 concernés) a fait valoir :

"En l'espèce, le fait de se retrouver seul pour conduire un train avec parfois 1000 personnes dont le conducteur devra assurer la sécurité en plus de conduire le train est constitutif d'un stress pouvant altérer sa santé. Le risque de panne sur les voies peut conduire à une situation catastrophique si les passagers non informés descendent sur la voie comme cela est arrivé récemment.

D'une part, le CHSCT a mandaté un cabinet d'expert AEPAC qui confirme le facteur majeur pour les conducteurs.

D'autre part, l'Inspection du travail a jugé que les mesures prises n'étaient pas suffisantes.

Le droit d'alerte du CHSCT du 21 octobre 2013 indiquait les dangers afférents à la conduite d'un agent seul. "

Dans son jugement le tribunal a reconnu :

"En conséquence : Le Conseil des prud'hommes, en sa formation de référé, juge que le demandeur est fondé a fait valoir son droit de retrait."

………. Et condamné la SNCF à payer les journées de présence des agents !

Comme les sanctions ne sont toujours pas levées, il y aura le 30 septembre un rassemblement NATIONAL devant la direction SNCF à St Denis Stade de France

Cette affaire dépasse largement le cadre régional, une grande partie du personnel s’est demandé en effet pourquoi donc mettre en place un tel dispositif sur une ligne considérée comme « à risques ». sauf si justement le fait d’y arriver permettrait alors de l’étendre au niveau national !

Dans d’autres régions d’ailleurs, cette expérimentation se heurte aux agents de conduite et là aussi des sanctions sont en route !

Mais c’est aussi un levier pour externaliser une partie du travail exercé par les cheminots au statut et placer des agents de sociétés de service privées ( tâches d’accueil et d’assistance ), personnel moins bien protégé et plus mal payé cela va sans dire !

 

*L‘auteur de ces lignes a encadré pendant 3 ans et demi des contrôleurs de Beauvais entre 1991 et 1994.

SNCF Paris Beauvais : un conflit « dur » qui dure !

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