Le syndicalisme que nous voulons

Publié le par L'Oise au Rouge 60

Dans le cadre des Cercles d’éducation populaire d’Ensemble 80!, nous avons organisé début juin une soirée autour de l’histoire et l’actualité du syndicalisme en France.

L’événement a été une belle réussite et a réuni une vingtaine de militant-e-s. Voici quelques éléments qui ont balisé nos échanges.

D’abord, le syndicalisme, c’est quoi ?

Le syndicalisme est historiquement la forme élémentaire d’auto-organisation collective des travailleurs, pour éviter que chaque salarié(e) soit considéré(e) comme un objet, une marchandise (cette marchandise particulière que Marx appelle « force de travail »). Une marchandise vendue selon la loi de l’offre et de la demande.

Le syndicalisme est donc une résistance au marché du travail capitaliste : éviter la concurrence par les salaires inégaux, par les conditions de travail, par les régions, l’âge, le sexe, la nationalité, les métiers, etc. C’est donc par le syndicalisme (entre autres) que les travailleurs peuvent prendre conscience qu’ils forment une classe sociale, exploitée selon des méthodes sans cesse renouvelées par le patronat.

Dans la lutte syndicale, les travailleurs se coordonnent sur le plan professionnel (syndicats d’entreprise, branches industrielles) et interprofessionnel (unions syndicales, ou unions locales par ville, union départementale, union interprofessionnelle nationale ou confédération syndicale).

Quels rapports entre syndicats et partis politiques ?

Nous affirmons la nécessité absolue de l’indépendance des syndicats. En même temps, chaque militant syndical, adhérant ou non à un parti politique, est libre de ses convictions et de les défendre. Nous pensons que la lutte syndicale et l’action politique sont complémentaires, et toutes les deux nécessaires, bien que différentes.

Le syndicalisme part des besoins sociaux élémentaires, mais brasse les questions générales, se confronte à l’Etat, aux gouvernements, aux lois, aux institutions. En un mot : à la politique. Par son expérience collective, le syndicalisme est amené à se poser des problèmes généraux de société. C’est ce que la Charte d’Amiens (datant de 1906) nomme à juste titre la « double besogne »: quotidienne (revendications) et d’avenir (lutte pour l’émancipation générale).

L’indépendance syndicale, absolument nécessaire, ne signifie donc pas un désintérêt du syndicalisme vis-à-vis de la politique. L’indépendance signifie que le syndicalisme détermine lui-même son champ d’action et qu’il ne saurait tolérer des comportements d’hégémonie, de courroie de transmission, de soumission du syndicalisme au politique ou à l’Etat.

Des revendications individuelles vers la lutte de classes

La lutte syndicale commence parfois par des aspirations ou des revendications individuelles, ou apparemment locales ou strictement professionnelles. Mais, au-delà de combats partiels, nous soutenons toutes les luttes et les revendications qui unifient le salariat tout entier, le mouvement syndical et les autres mouvements sociaux. En un mot qui deviennent des luttes commune à tous les salarié(e)s, des luttes de classes.

Lorsque les salarié(e)s aspirent à agir, tout doit être fait, dans la transparence des positions et des débats, pour parvenir à l’unité d’action. L’unité dans la lutte n’est pas contradictoire avec le débat pluraliste, l’échange public d’opinions. Chaque fois que possible, les désaccords entre organisations doivent être traités par tous les salariés (consultations, assemblées générales) qui doivent avoir le dernier mot : c’est la démocratie.

Les risques de bureaucratisation

Les conditions de travail et d’existence imposées aux salarié(e)s par le capitalisme nourrissent la tendance à abandonner à des porte-paroles spécialisés (délégués syndicaux par exemple), la tâche de représentation de leurs intérêts face au patronat ou aux pouvoirs publics.

Dans ce cas, seule une infime minorité des salarié(e)s connaît et contrôle les activités des délégués. Il y a un risque permanent de bureaucratisation, de voir les intérêts d’auto conservation bureaucratique prendre le pas sur la défense des intérêts des salarié(e)s.

Plus une organisation syndicale a un fonctionnement de type pyramidal, fortement centralisé, ou l’autonomie des syndicats, le droit d’expression et le respect des minorités sont bafoués, plus son rapport aux salarié(e)s, y compris lors des mobilisations et grèves, sera aussi de nature autoritaire et bureaucratique.

Mettre des garde-fou, introduire des limites aux cumuls et au temps de mandats, sont des garanties élémentaires. On pourrait même imaginer l’interdiction du droit de vote pour les permanents, notamment lors des congrès syndicaux, comme garantie supplémentaire. Le fonctionnement interne de la plupart des grandes centrales syndicales, pyramidales et centralisées, est loin d’être un exemple de démocratie.

La démocratie directe et l’auto organisation

Les salarié(e)s organisé(e)s de manière permanente sont une minorité. Les non syndiqués, apparemment passifs pendant de longues périodes, peuvent se révéler très différents dans les phases de luttes sociales massives. Ils peuvent prendre des initiatives et montrer une radicalité surprenante.

Nous avons coutume de dire que l’expérience sociale des luttes fait partie de l’apprentissage de la conduite autogestionnaire d’une société véritablement socialiste. Ce n’est pas une rhétorique pour les jours de fête mais bien une pratique sociale à favoriser ici et maintenant.

La démocratie ouvrière part d’abord de la simple consultation des salarié(e)s. C’est tout le débat, qui n’est pas simple, notamment autour du référendum des salarié(e)s. Promouvoir les assemblées générales décisionnelles, associer par tous moyens les non syndiqués à la conduite de l’action, élire un comité de grève avec participation des syndicats et avec des représentants révocables par les grévistes, intégrer les non syndiqués dans les négociations, tels sont les exemples non exhaustifs de pratique démocratique.

L’auto organisation permet d’imposer l’unité, de contrôler la lutte, d’exiger la transparence des informations, de coordonner les forces pour aller vers le tous ensemble. Un syndicalisme lutte de classe n’a rien à redouter de la démocratie directe car elle s’inscrit dans sa conception même du projet d’émancipation sociale globale.

Agir au niveau national et international

Nous agissons pour conjuguer luttes nationales et mobilisations internationales : face au multinationales et à l’internationalisation du capital, tisser les solidarités et les actions pour combattre la concurrence de tous contre tous, et la marchandisation du monde.

Le syndicalisme doit être un acteur décisif des mobilisations internationales contre la mondialisation libérale, et contre l’Europe capitaliste. Il doit occuper sa place dans les convergences unitaires qui se construisent (G8, Forum social européen et mondial, lutte contre l’OMC, CETA/TAFTA/TIPP) et qui rassemblent des mouvements sociaux très diversifiés (salariés, jeunes, écologie, paysans, femmes, minorités nationales opprimées …).

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